« Un jour, bientôt peut-être.
Un jour j’arracherai l’ancre qui tient mon navire loin des mers.
Avec la sorte de courage qu’il faut pour être rien et rien que rien, je lâcherai ce qui
paraissait m’être indissolublement proche.
Je le trancherai, je le renverserai, je le romprai, je le ferai dégringoler. […]
Vidé de l’abcès d’être quelqu’un, je boirai à nouveau l’espace nourricier. »
Henri MICHAUX, Clown, 1966
En 1966, au moment où Réjean Ducharme publiait chez Gallimard son premier roman, l’écrivain français Henri Michaux publiait chez le même éditeur ce poème qui semble répondre à la posture de retrait médiatique absolu qu’a respecté jusqu’à la fin l’auteur de L’Avalée des avalés.
« Vidé de l’abcès d’être quelqu’un, je boirai à nouveau l’espace nourricier. »
Et pourtant… à travers tout le Québec ainsi qu’en Europe, l’identité, le visage, la personne même de Réjean Ducharme, fut l’objet d’une chasse à l’homme pitoyable, par média interposé. Une chasse à courre, presque, qui dura deux ans. Deux ans! Jusqu’à ce qu’un journal, Le Nouvelliste, un journaliste, Normand Lassonde, et un photographe, en août 1968, coince l’écrivain, rue de l’Esplanade à Montréal, en face de chez lui. Et qu’ils fassent le lendemain, de cette effraction intime, la une de leur publication. « On entre dans la vie posthume sur la pointe des pieds ». Dans le cas des inventeurs de mondes, et c’est le cas des grands écrivains comme Réjean Ducharme, la vie posthume, encore si pleine de l’œuvre à leur mort, se fait souvent lente, discrète.
Cette conférence vous propose de revisiter non pas tant l’œuvre de Ducharme mais sa vie même pendant une période clé des années soixante, soit de 1966 à 1969 où Gallimard publie un titre de Ducharme par année. Sait-on seulement ce qu’il se passa dans la vie de ce jeune écrivain alors qu’il devient l’une des figures les plus importantes de l’histoire littéraire du Québec? Nous pouvons répondre que oui puisqu’on connait bien aujourd’hui une foule de péripéties survenues alors et qu’il vaut la peine de se remémorer 50 ans plus tard, par la voix royale des archives!
Conférencier
Journaliste médical, auteur d’un essai biographique consacré à Guy Mauffette, le Laboureur d’ondes (MultiMondes, 2005), Luc Dupont a commencé à s’intéresser vivement à Réjean Ducharme, lors d’un spectacle qu’il co-réalisa en 2014 afin de célébrer la mémoire du couple formé par Gérald Godin et Pauline Julien, qui furent de fidèles amis de l’écrivain. La même année, il rencontrait par le plus étonnant des hasards, non pas l’écrivain, mais sa compagne de vie commune pendant 50 ans, Claire Richard (1928-2016). Une tendre amitié se développa entre eux, et Luc Dupont, dans cette foulée, participa à l’hommage qu’on rendit à Réjean Ducharme, dans le village de St-Ignace-de-Loyola, lors du 50e anniversaire de la parution de L’Avalée des avalés.
De là est née cette conférence, composée d’archives télévisuelles, radiophoniques et cinématographiques, qu’il nous présente à la toute veille de l’anniversaire de naissance de l’écrivain.
L’anniversaire de Réjean Ducharme survient – merveilleuse coïncidence, l’a-t-on jamais évoquée? – avec la 6e édition de l’événement « Le 12 août, j’achète un livre québécois ».
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